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Ophélie

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La question du jour : quel est le rapport entre cette illustration et le post d’aujourd’hui?

Résumé de l’épisode précédent : Fanette, étudiante débarquée de province, sympathise avec un groupe de jeunes gens farfelus. Mais, après les examens, le groupe peine à se reformer. Fanette discute avec Ophélie.

– Tu vois souvent Laurent? venait juste de me demander Ophélie.

Et il y avait une lueur dans ses yeux, que je décidai d’ignorer. Non, elle ne faisait que poser la question, peut-être s’était-elle sentie un peu mise de côté? la pauvre – et en plus elle avait raté ses examens.

– Euh, parfois, enfin depuis les exams je l’ai vu deux fois.

– Hm, fit Ophélie d’un air lourd de signification. En tout cas, méfie-toi de Leena.

Après cette conversation, je me dis que notre groupe était foutu, mais je décidai de ne pas me laisser abattre. J’avais passé une trop bonne année. Je voulais repasser une autre super année ; pas question de me laisser abattre par des considérations contingentes -merde. Ophélie était probablement vexée par son échec, et il ne fallait pas laisser ce genre de sentiments nous séparer. Je téléphonai deux ou trois fois à Ophélie, pourtant abbatue, et tentai d’être follement guillerette avec elle.

Mirabelle m’appela deux ou trois jours après, en me demandant si Ophélie lui faisait la gueule. En effet, elle avait tenté d’avoir plusieurs conversations téléphoniques avec elle, en vain, Ophélie était fatiguée, malade,pressée – impossible à atteindre par des mots. « Elle est super mal, dis-je, d’un air dégagé, en essayant aussi de prendre des airs mystérieux et avertis. « Il faut lui laisser un peu de temps. « Je commençais à mieux maîtriser la terminologie. Il fallait emplyer des mots lourds de sens et toujours laisser entendre que les gens éprouvaient des sentiments très lourds et très encombrants. très douloureux aussi. On pouvait forcer facile sur le dramatique. Mais Mirabelle était encore trop pharisienne ; elle appelait un chat un chat. Quelle horreur.

– Ben, elle a rien foutu, me dit-elle. Après elle s’étonne qu’elle se plante. Elle va pas faire la gueule aux autres parce qu’elle fout rien?

– Mais si, elle a travaillé, dis-je, je me sentais obligée de défendre Ophélie. Elle avait un si poétique appartement.

– Arrête !!! rigola Mirabelle. Bon, enfin moi je m’en fous. On se fait une bouffe chez Auré?

(je n’ai pas parlé d’Auré, je ne peux pas parler de tout le monde).

Va pour la bouffe chez Auré ; Ophélie vint, drapée dans sa douleur. Il y avait Philippe; qui fut charmant avec elle. Les affaires reprenaient. A la fin de la soirée, Ophélie parlait presque avec animation ; l’ambiance des jours passés revenaient.

Mais il y eut les vacances ; je partis pour mon pélérinage marathon familial annuel ; faire le tour de ma famille, version longue, me prenait deux mois. Mais la rentrée finit par arriver, et je revins à Paris.

Début septembre, donc. Les débuts d’années sont toujours fouillis. On cherche ses cours, ses heures, son emploi du temps, les TD sont remplis, on en trouve d’autres, les salles de cours s’annihilent, reparaissent ailleurs, etc.

D’ailleurs, transformée par mes vacances, je me sentais moins proches des autres. Que je revis aux inscriptions. Nous nous lançâmes des « Salut!!! »,  » ça va??? » accompagnés de bisous assez hypocrites. Je me souvenais avec une mélancolie rageuse de l’année précédente ; qu’elles fassent la gueule, si elles voulaient, après tout.

Mais j’étais à côté de la plaque.

Mirabelle entamait une triomphante deuxième année. Avec Auré : moins triomphante, mais en deuxième année. Avec Leena : moins triomphante aussi. Avec moi : vexée de mon médiocre score.

Ophélie ne pouvait pas nous laisser tomber. On aurait pu la croire jalouse. Alors que pas du tout.

Il y eut diverses invitations, réinvitations, soirées pétillants (l’oncle d’Ophélie produisait, fort opportunément, un petit vin qui n’avait pas l’appellation, mais que l’on appelait joyeusement « Pétillant de Touraine » ; ça pétillait violemment; j’en ai gardé un souvenir plus qu’ému ; le pétillant nature; le pétillant cassis, et le pétillant mûre, on a même tenté le pétillant avec tous les fonds d’alcool, c’était affreux et imbuvable, mais on l’a bu, comme des cons, avant de s’entasser, pour d’obscures raisons, à 7 dans une deux chevaux conduite par un garçon à qui on venait de retirer le permis de conduite ; je n’ai pas un souvenir net de la soirée, comme si j’avais eu un bandeau sur les yeux tout le temps ; mais la deux chevaux roulait très lentement, et on n’a pas été loin , et il était tard, il n’y avait pas de circulation ; on a été du 15 ème au 7 ème – en se perdant, je crois – et ne poussant des hurlements de veaux en passant devant le dôme des Invalides – je dis ça tant qu’il est encore à peu près licite de picoler).

Bref, j’étais contente. J’avais retrouvé mes copains. Tout était super.

To be continued.

PS n’ayant rien à voir avec la choucroute :

Aujourd’hui, j’ai vu tous d’un coup les stats monter dans l’après midi, et des gens venir d’un site que je ne connaissais pas, Epidémik. J’y suis couru, et ils critiquaient le blog de Fanette, dans les comm d’un post sur un autre blog. Je n’ai pas eu le temps de tout lire bien en détail, c’est deuxième degré donc j’ai pas tout saisi mais marrant. Résultat ils ont fait monter mes stats. C’est merveilleux. Cette note est nulle parce que j’ai encore picolé et que je suis appelé par des amis pour voir un film alors que je leur casse les pieds à poster. Alors j’y vais. (Mais ce soir, je n’ai pas mangé de fromage, je tiens à le préciser).

N’oubliez pas de répondre à la question du jour. Il n’y a rien à gagner.

La réponse à la grande question sur la vie, l’univers et le reste

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(résumé de l’épisode précédent : Fanette, jeune étudiante venue de province et qui ne connaît pas grand monde dans la grande ville, se retrouve dans une file d’attente d’inscription à un TD avec Laurent, qu’elle ne connaît qu’un peu, et ils se découvrent par hasard une passion commune pour la SF, surtout le Guide du routard galactique).

Il me dit donc :

– Mais alors tu connais la réponse à la grande question sur la vie, l’univers et le reste?

Et je lui réponds avec enthousiasme :

42. (Don’t panic, j’ai mis un lien pour aider le néophyte).

J’avais un peu le sentiment qu’un américain fuyant une prison afghane qui aurait rencontré au souk de Baghdad un diplomate anglais aurait eu ressentir. J’exagère. mais bon. Je sortais de six ans de vie chez mon oncle Guillaume, aux côtés des chevaux, pour lesquels mon amour s’était fortement tenté d’ennui l’année du bac, et je n’étais pas habitué à rencontrer des amateurs de SF, qui pour moi était un plaisir solitaire.

– Je ne comprends pas, disait mon oncle qui n’aurait jamais lu un roman, mais respectait silencieusement et de réputation tous les grands auteurs français. Comment peux-tu lire Balzac et ça?

J’essayais de lui expliquer qu’il y avait une ambiance SF dans certains poèmes de Victor Hugo, par exemple la conscience (une chute merveilleuse : Quand il se fut assis sur sa chaise dans l’ombre/ Et qu’on eut sur son front fermé le souterrain/L’oeil était dans la tombe et regardait Caïn.) mais Guillaume n’était pas convaincu qu’un amateur de Sf ait sommeillé en Victor Hugo. Donc là, tout à coup, hop, je rencontrais un garçon plutôt présentable (aucune excentricité extérieure clairement indentifiable, ni vestimentaire, ni capillaire) et pouf, on partait chez les Vogons.

Laurent avait un côté star, et il était en deuxième année (un redoublant, il avait raté plein d’UV). Il était entouré d’une nuée de petites jeunes filles toutes plus ou moins semblables, allant du bermuda bleu marine avec polo et carré Hermès pur et dur à des looks plus tendances (de l’époque), et qui s’appelaient de noms comme Astrid, Marie-Aurélie, Alexandriane, vous avez bien lu, mais on ne choisit pas ses parents, et c’est eux qui vous nomment, Ségolène, Aude, Marie-Christine, Marie-Hélène, et une redoutable Leena, hein, rien que le prénom, et qui ajoutait à ce prénom (plus redoutable à l’écrit qu’à l’oral, car ça sonnait Lina, platement) mais surtout franco-américaine, d’une mère américaine, donc mais d’origine mexicaine. Au milieu de toutes les petites filles, on ne voyait qu’elle, et elle me détesta, alors que je ne demandais qu’à être son amie (j’étais en mode fais-toi des copains/copines, mode dans lequel je peux sympathiser avec trois pensionnats, un équipage de marins polonais et deux ou trois BD). Et moi, j’aimais la Sf, ah aha ah. Et elle pas. Mieux, elle avait choisi l’option : « je vais te débarasser de tes goûts regressifs », c’est moi qui dis régressif, mais elle trouvait que Laurent avait de mauvaises fréquentations et des goûts exécrables. Oh, tiens, je me demande s’ils sont ensemble. Oh tiens, Facebook pourrait m’aider? Plus tard. Rétrospectivement, je dirais qu’elle planifiait un mariage. Je ne l’ai pas vu du tout, attendu que même maintenant, je ne planifie aucun mariage. Donc à 18 ans, s’il vous plaît.

Donc, là, au milieu de tout ce monde, nos âmes se sont trouvées. Grâce à Arthur Dent (le routard galactique).

Alors, autant le dire, oui, j’ai été amoureuse, mais pas tout de suite. Je n’étais en mode amoureuse. J’avais un amour, à l’époque, et pas Laurent. Quand même, j’ai trouvé Laurent super, dans le genre dégingandé de mauvaise humeur. Un charme, vous savez, quand vous êtes jeune vous voyez vite du beau ténébreux, partout, enfin moi. Il n’était pas hyper beau, mais il avait un charme, et il était plus sombre que ténébreux. Mais bon, ça se rapprochait, c’était le concept. On s’est mis à parler à toute allure de pleins de trucs et on n’était aussi surpris l’un que l’autre. Malgré l’ironie mordante dont je fais preuve envers les Marie-Ségolène et Laure-Astrid (que je respecte complètement, car je suis devenu copine avec l’Astrid en question, une sorte de clone blond fin de race d’Anne Roumanoff), j’étais à l’époque vêtue d’un jean, ce qui pouvait faire vaguement négligé, mais j’avais un chemisier, une lavallière (c’était mon époque lavallière, en fait j’étais aussi fan de Rimbaud), et une veste – bleu marine – et – ah ah ah – des mocassins plats à glands.

Ceci est un coming-out, enfin j’avoue, oui, j’étais super ring’, mais alors, de chez.

Je conserve d’ailleurs encore une vague tendresse pour ce look. Je peux vous dire par exemple que si je vais chez tante Etiennette comme ça, ça déchire à donf’, elle croit que je suis enfin secrétaire. Mais bon, chez tante Etiennete, c’est un autre monde, donc on ne peut rien dire.

Je voulais en venir là, je vais y arriver : mon look et mes conversations antérieures avec sa copine avec qui j’avais sympathisé lors des inscriptions ne l’avait pas amené à me suspecter d’accointances avec les Vogons. Ni avec les Woëvres. Ni les vers des sables. Je le comprends. Je ne me ressemblais pas.

Donc, nous avons sympathisé, follement, comme deux groupies. Il s’est avéré que je lisais également les Princes d’Ambre. Ah ! Que n’avais-je pas dit. Le problème, c’est que je les lisais dans le désordre (je les empruntais en bibliothèque et je n’avais pas la patience d’attendre pour lire chaque volume dans l’ordre), et que je me mélangeais dans les personnages, sans compter que le récit est fait par le père, Corwin, puis par le fils, Merlin, et que je n’aimais pas Merlin (je n’aime pas les changements ; le narrateur c’était Corwin et puis c’est tout ; je n’aime pas qu’on me change mon narrateur en plein milieu).

Donc folie, dialogue, passion.

Nous ne nous quittions plus, enfin si, un peu. Leena, la sirène aux cheveux châtains, ne nous quittait pas nos plus. Elle était extrêmement désagréable avec moi. Laurent ne s’en souciait pas. Il nous traînait derrière lui, avec deux ou trois autres, comme un prince sa cour, et la laissait me balancer des vannes que je comprenais le soir (je passais des nuits à remâcher ma rage). Ma chance, c’est qu’elle ne supportait réellement pas la Sf.

Laurent avait d’autres copains : Aymeric, catholique et alcoolique ; Philippe, artiste et accro aux jeux de rôle ; Olivier, le sérieux bon élève qui travaille mais qui devait aimer les farfelus ; Franck, le pilier du café d’à côté, en fait informaticien dans un boîte quelques rues plus loin ; Arnaud, qui alternait entre « je suis un démon » , « je suis un loup-garou » et « je suis une entité extra-terrestre », buvait avec Aymeric et était en quatrième année de Deug (détail sympathique : il est devenu fonctionnaire dans je ne sais plus quelle administration).

En fait, ils voulaient tous plus ou moins coucher avec l’une ou l’autres des filles qui gravitaient autour de Laurent, surtout Leena. Il y avait aussi d’autres filles, mais si je donne les prénoms, ça va faire désordre. Plus tard.

Donc, grâce à Laurent et à ses fréquentations, ma vie est devenue charmante. J’allais en cours, seule, plus ou moins (je me suis aussi fait des copines). A part Olivier, et Aymeric par période, les garçons ne débarquaient en cours que vers 10 heures, voire onze. De plus, ils décrochaient vers quinze heures. Ils allaient au café. Franck allait au café vers une heure, restaient avec eux, revenait vers 15 heures trente, puis à 18 heures. Arnaud allait en cours au début, puis en janvier il commença à sécher et ce fut le début de la fin. En mai, il arriva en cours ivre mort avec Aymeric, ils vomirent tous les deux et je ne sais ce qui se passa (rien de grave).

Moi, j’allais indéfectiblement en cours et j’étudiais, avec mes vestes bleu marine et mes mocassins. Bon, mon look évolua. Je passai de la veste au blouson et du mocassin à la chaussures de sport. Ultérieurement, je découvris qu’on peut faire des effets de pull, d’écharpes et d’escarpins avec un jean. Hou, comme je devenais parisienne.

Je rejoignais la bande au café vers 16 heures, et je vivais des heures délicieuses. Nous ne faisions pas grand chose à part rire beaucoup, et fort, et des systèmes de quizz sexo-amoureux inventés par Arnaud et qui avaient beaucoup de succès.

To be continued on next thursday.